Mon histoire suit une ligne qui part de Lens et arrive à Rennes, en passant par Compiègne, Verneuil sur Avre et autres villes normandes, le Mans…
C’est l’amour qui m’a guidé tout au long de ma vie, et si elle fut tumultueuse et parfois terrible, elle est incroyablement enrichissante et belle.
30 mai 2024. Je suis photographe au Mans.
Un homme monte les marches de mon studio. Il ne se rend pas chez le photographe, il vient rencontrer Rhéa (qui parle de lui à la troisième personne – décidément, j’adore rédiger des trucs sur moi-même).
Les souvenirs de cette journée dansent. Les yeux clairs, humble, jamais assez de parmesan, bosse à la SPA, réservé voire timide, et bordel, j’ai parlé de ses yeux !?
Il semblait qu’il ne puisse rien y avoir de sombre chez cet homme.
Après un déjeuner italien (avec pas assez de parmesan, donc…), je l’ai photographié.
Allongé par terre, avec Eywa, sa chienne qui l’accompagnait et qui, vu son âge et sa fatigue, ne pouvait pas s’asseoir.
Il a eu ces mots :
« Elle a été parfaite toute sa vie. Elle va partir. Ça me terrorise. »
J’étais foutu.

J’ai joué du piano. Il m’a écouté, en me regardant avec ses yeux éblouissants.
Je suis passé derrière son dos. Je l’ai pris dans mes bras.
Et il a posé sa tête contre la mienne.
Il venait de Rennes.
Il n’a fallu que quelques semaines pour que nous décidions de vivre ensemble (ou, comme il dit, pour que j’entre dans sa vie comme on entre dans un saloon…).
Le studio du Mans ressemblait à une assurance. Un “au-cas-où”, un “on-sait-jamais”, comme on en a plein dans les cartons de nos garages qu’on n’a jamais vidés après un déménagement.
Je n’ai jamais eu besoin d’assurance. Mais je sais que le bonheur s’encourage.
Et je savais que la Bretagne m’accueillerait. Être queer à Rennes, c’est comme être arrivé chez soi.
Alors, va pour être photographe à Rennes.
Je n’ai jamais fait le choix de mes lieux d’activité en fonction de la concurrence. La concurrence n’existe pas pour moi. Il n’y a que d’autres offres, d’autres styles, d’autres talents, et “chacun de vous” a son “chacun de nous”.
Je n’ai pas non plus fait d’étude de marché.
Non, un matin, c’était décidé.
Pour cette décision comme pour chaque étape de la suite, il m’a soutenu et épaulé.
C’est parti pour la recherche d’un studio photo à Rennes.
Pas simple, quand on vient de quitter 150 m² et des plafonds à plus de 3m. Mais le confrère le plus talentueux avec lequel j’ai exercé (Aka le père de mes deux petits derniers, Kris MoOg, que je vous invite à découvrir) m’a appris que l’essentiel est tout.
C’est quoi, mon essentiel ?
L’ombre. Une table. Une douche (la lumière, pas l’hygiène – quoique…). Et vous.
Un espace pour poser un bureau.
Un espace pour vivre vos projections privées.
Et rien.
Et ces locaux me sont tombés dans les bras. Accessibles à pied depuis notre maison, sortie de rocade, parking. Un peu tristounes, mais rien d’insurmontable.
C’était signé en quelques jours.
Une nouvelle occasion d’aimer mon mec et d’aimer sa famille qui m’a accueilli avec tellement d’amour : Olivier et son père, à 4 pattes, posent le parquet. Je gère les murs.
Quelques semaines.
Et il est là.
Mon nom sur la vitrine, ma trogne sur des affiches, mes deux petites muses Gabrielle et Louise sur la colonne devant le studio.
Je suis photographe à Rennes.
Et je ne vous propose pas une galerie ou un studio énorme.
Je vous propose l’essentiel : un photographe professionnel et artiste reconnu, un endroit confortable et chaud où se mettre dans le noir et se confier, une table, une lumière, des œuvres d’art. Un espace de liberté.
Je vous propose de l’amour, car je ne crois en rien d’autre.
J’aurais bien terminé ce billet là-dessus, mais c’est à cet homme que je veux m’adresser maintenant :
Si la vie est si belle, c’est parce qu’il y a un an, tu t’es laissé aller à poser ta tête contre la mienne.
Joyeux anniversaire de nous, C***




